mardi 17 novembre 2009

brève éducative

Professeur Flaxou rigole beaucoup quand je lui raconte mes journées :

- Et alors là je lui ai dit non Ellie, tu ne peux pas continuer à confondre l'infinitif et le participe passé ! En France on t'aurait déjà fait redoubler, jeune fille ! J'en ai parlé à Becky pendant la pause déjeuner et elle m'a dit qu'elle était toujours comme ça pendant ses cours à elle. Je te jure, ils sont mignons mais ils m'épuisent.

Ca oui, ils m'épuisent.

Quand je suis partie j'avais 21 ans, là j'ai la soixantaine.

Je regarde mes élèves, les petits anges, et je me dis Hitchcock mon Hitchcock, mais non ce n'est pas possible, la jeunesse a changé, on était pas comme ça à leur âge.

Les filles ont des leggings et des mèches décolorées-déstructurées-dématérialisées qui leur mangent tout le visage, je sais même pas comment elles peuvent marcher sans se prendre des murs. Les garçons ont des mini-crêtes et quand ils rigolent on voit le flash de leur appareil dentaire.

Ils sont plein de boutons et se rongent les ongles, ils s'étalent dans leurs chaises et font des airs boudeurs parce que c'est mystérieux, ils gloussent dans tous les sens quand je dis "chaque" parce que ça sonne comme "shag", et quand ils sont amoureux en secret, c'est mignon de voir à quel point c'est évident.

Et ils ont des habitudes quelque peu... étranges.

- Que fais-tu pendant ton temps libre ?
- Je vais au parc.
- Oui, comme les cinquante autres depuis le début de la semaine à qui je pose la question. Et tu fais quoi au parc ? Tu joues au foot, tu fais la course, tu jettes des cailloux dans la rivière ?

Là c'est le moment où la gamine essaye de se cacher encore plus derrière sa mèche, mais ça fait déjà dix minutes que je vois plus ses yeux.

- Nan, on fait ... rien.
- Rien ? Genre vous vous retrouvez tous, vous vous asseyez en rond et vous restez chacun prostré dans le silence complet jusqu'à la tombée de la nuit ?
- Nan, on... discute.

Genre.

- Tu sais, moi aussi j'étais jeune il y a quelques années.
- Ah bon ?

Y'a des fois, c'est des petites phrases, mais ça fait mal quand même.

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