lundi 22 avril 2013

L'instant Kiwi

On continue dans la lancée de ces petites différences qui rendent la Nouvelle-Zélande si spéciale.



Instant Kiwi n°4 : Les Kiwis se couchent avec les poules.



(Entre membres de la même famille, hein.)

Et pourtant, avant de trouver un job où je travaille de nuit et qui a complètement bouleversé mon cycle de sommeil, j'étais aussi une poule. Genre tout le monde se foutait de ma gueule aux soirées parce qu'à 23h30 je commençais à bâiller, et qu'à une heure du matin je m'endormais comme une patate dans un coin de canap'.

Mais les gens, ici ce serait être une couche-TARD, ce comportement!

Oui, parce que les fêtes, en Nouvelle-Zélande, elles commencent tôt et elles s'arrêtent tôt. Et même Professeur Flaxou et moi (qui ne sommes pas vraiment des fêtards invétérés, tu t'imagines bien) on a eu du mal à s'adapter.

Par exemple, nos colocs ont récemment fait une fête à la maison pour célébrer leurs fiançailles. Ils ont invité tous leurs amis, qui ont grosso modo tous la trentaine. Moi je travaillais en soirée, donc j'ai dit à Maria (ma coloc) :

- Ah c'est dommage, ça m'emmerde de rater ça. Mais bon, je finis à minuit, donc je serai au moins là pour la fin de soirée!

Et là, elle a rigolé, et elle a dit :

- Nan nan, mais on commence à 16h, donc à minuit, ce sera déjà fini.

Alors déjà : commencer une soirée à SEIZE HEURES? 

Même Mamie et Papy, quand ils vont dans les Ardennes faire la chouille avec Pierrette et Gérard, ils commencent pas l'apéro avant 18h! (Et Mamie a 78 ans et une prothèse de genou, toi c'est quoi ton excuse?)

Et le pire, c'est que quand Flaxou est venu me chercher au boulot, je lui ai demandé si la soirée était bien, et il a dit :

- Ouais c'était cool... par contre, ça a fini super tôt!
- Du genre?
- Du genre, quand les derniers invités sont partis, il était 21h30.

(J'ai précisé que c'était un samedi soir?)

Donc, en Nouvelle-Zélande, l'idée d'une fête, c'est aller chez les gens, discuter, manger et boire, et être rentré à la maison et au lit pour 22h. 

(Hardcore.)



Instant Kiwi n°5 : the ixint.

Après 5 mois dans le pays, j'ai enfin réussi à comprendre comment l'accent Kiwi fonctionne.

Pour faire un accent kiwi, c'est facile! Il faut prendre toutes les voyelles de la langue anglaise et les remplacer par d'autres voyelles de cette même langue.

Ainsi, le "i" devient "e", le "e" devient "i" (effet miroir), le "ai" devient "i" aussi (parce qu'il y a deux "i" dans "Kiwi", donc on met des "i" partout, c'est la fête!), le "ey" devient "oy", le "o" devient "u", et autres joyeusetés et bizarreries.

Cela donne donc lieu à de nombreuses incompréhensions, notamment le chiffre "six" qui est prononcé "sex" (ce qui peut mener à des petits quiproquos si on n'y fait pas gaffe).

Pour ton éducation, je partage un petit extrait de l'accent Kiwi :



(Cette série est trop cool et je suis officiellement amoureuse de Brett.)

Et on finit par une petite blaguounette de l'excellent Xenophobe's Guide :

A hostess telephones an American to stay in her unfinished home, still uncarpeted, and with bare concrete floors. "I warn you", she says, "it's pretty basic. There may be sacks on the floor". There was a slight pause, then the American came back with an accomodating : "Yeah, sure. Sex on the floor, sex anywhere."



Instant Kiwi n°6 : Aussies

Rarement une relation entre deux cultures aura plus joué la corde raide entre amour et haine que celle des Kiwis et des Aussies.

Ces deux peuples partagent énormément de points communs : l'isolement géographique, la culture Britannique "coloniale" (n'oublions pas que, dans les deux pays, la Reine Elizabeth est toujours le chef d'Etat officiel, et que sa tête orne les pièces de monnaie), l'amour de la nature et des espaces verts (enfin, "verts", en Australie, faut le prendre comme une licence poétique, hein), une histoire pas très jojo avec les autochtones (Aborigènes ou Maoris), etc.

Les deux pays jouissent également d'une relation privilégiée : en Nouvelle-Zélande, pas besoin de Visa pour aller vivre ou étudier en Australie (et il me semble que c'est la même chose dans l'autre sens, même si ça arrive beaucoup moins) (les salaires en Australie sont bien supérieurs à ceux d'ici). Il est également très facile de se procurer des dollars australiens, et la plupart des magasins dans les grandes villes les acceptent comme monnaie courante. Les touristes, enfin, circulent énormément entre les deux pays, vu qu'ils sont les deux seuls pays anglophones du coin (plus facile pour ces cultures unilingues).

Et pourtant, la rivalité fait rage entre ces deux frères de lait. (Une rivalité uniquement culturelle, vu que politiquement et économiquement, la plupart du temps, ils s'entendent comme cul et chemise.)

Ainsi, les Australiens se moquent du côté un peu "plouc" des Kiwis (la blague récurrente étant qu'ils couchent avec des moutons), et les Néo-Zélandais, quant à eux, trouvent que les Aussies c'est quand même des sacrés crâneurs alors qu'ils ont un pays tout vide avec juste un pauvre caillou au milieu, et d'abord nous on a fait le Seigneur des Anneaux, alors hein.




(J'suis désolée, y'a pas de quoi être jaloux.)

En somme, ça reste pour la plupart des gens une rivalité bon enfant, à l'image des nombreuses (très nombreuses) vannes que j'ai entendues depuis mon arrivée ici.

Petit florilège :

1. En allant faire du rafting dans l'île du Sud, le guide nous fait passer les instructions de sécurité : "Bon les gars ne vous inquiétez pas, c'est traduit dans toutes les langues si jamais votre anglais n'est pas très bon. Est-ce qu'on a des Aussies parmi nous?" Deux filles lèvent timidement la main. "Super, on a des explications en images aussi, donc pas de problème".

2. Une blague qu'on entend souvent ici, en référence aux nombreux Kiwis qui s'expatrient en Australie : "Quand un Kiwi déménage en Australie, le QI moyen des deux pays augmentent".

3. Cette pub pour Mitre 10 (magasin de bricolage, imagine un Castorama de huit mille mètres carrés) qui tourne partout à la télé :



Je m'excuse à l'avance pour cet accent absolument incompréhensible (les petits Kiwis sont le cauchemars des immigrants). Transcript ci-dessous réalisé par mes soins (après 30 visionnages et une aide de mon coloc pour la fin) :

- What are you doing this weekend?
- I'm putting up a retaining wall.
- Doing it yourself?
- No, I'm going to get some blokes in. (Comprenez : il va engager 2-3 gars)
- Oh come on mate, do it yourself!
- She's a pretty big job. (NB : se référer aux objets inanimés comme "she" est un truc très Kiwi)
- You'll be right. (Encore une expression Kiwie)
- You reckon? 
- Reckon you'll knock it over in half a day.
- Yeah?
- Get a couple of mates around! Hey Jonesie! Give us a hand with the job Saturday!
- Nay, you're dreaming! (accent Australien)
- Aussies.
- Oh, no surprises there.

4. Quand la Nouvelle-Zélande a voté la loi pour le mariage homosexuel, le New Zealand Herald a consacré la moitié de son article a raconter comment le monde entier trouvait ça trop bien et que "enfin tout le monde parlait de nous pour autre chose que le Hobbit, youhou c'est la fête!" et l'autre moitié de l'article à dire que "cette loi nous prouve, encore une fois, que les Kiwis sont décidément toujours en avance sur les Aussies quand il s'agit de l'égalité sociale". (Article en lien ici, je te jure que j'exagère même pas.)

Pour finir, note que les blagues entre Kiwis et Aussies sont souvent exactement les mêmes, mais changent simplement de protagonistes de chaque coté de la barrière de corail. (Un peu comme les blagues entre Alsaciens et Vosgiens, sauf que tout le monde sait que les Vosgiens sont de mauvaise foi.)

A bientôt pour de nouvelles aventures au pays des Moa! (y'en a marre de dire "Kiwi" tout le temps.)


PS : Comment t'expliques que je maîtrise l'accent Kiwi suffisamment pour comprendre les mômes de la pub Mitre 10, mais que j'ai toujours pas compris un traître mot de ce que me raconte mon chauffeur de bus tous les soirs? (Pour l'instant je hoche la tête et je souris, et ça semble le satisfaire.) (J'espère juste qu'il me raconte pas des trucs cochons.)

vendredi 19 avril 2013

Over the rainbow



Je prends juste une petite pause dans la rédaction de mes aventures chez les Kiwis pour te sortir un petit article "à chaud" (chose que je m'interdis de faire d'habitude, mais merde, si on peut plus désobéir à ses propres règles, autant se coller une balle dans le slip tout de suite).

Parce qu'aujourd'hui, au boulot, en discutant avec mes collègues, j'ai entendu, comme ça, mentionné en passant, qu'hier le Parement néo-zélandais avait voté une loi pour autoriser le mariage gay.

Et ma première pensée, ça a été : COMMENT est-ce que j'en entends parler que maintenant?

Parce que, d'accord, je regarde pas la télé, mais je lis le New Zealand Herald deux fois par semaine!

Le New Zealand Herald! Et ils ont pas pensé à mettre ça en première page au lieu de parler du championnat de Ligue 3 de netball? Sérieusement?!

Pour info, le NZH (ouais je fais des acronymes, je suis trop une locale) c'est un peu "le Monde", mais version Kiwie : c'est-à dire qu'on parle que des pays anglophones et/ou du Commonwealth.

(Ouais, même les îles les plus paumées du Pacifique ont droit à leur article d'une page sur le thème "eh t'sais quoi, ben l'autre jour ils ont pêché un vache de gros poisson, ouah, fallait qu'on mette ça en une parce que hein, c'est pas tous les jours qu'on pêche un gros poisson comme ça, dis donc".)

Donc ça fait des semaines, des mois que le Parlement débat sur l'adoption de cette loi (score final pour ceux que ça intéresse : 77 voix contre 44) (oui, c'est un tout petit Parlement). Et j'en avais même pas entendu parler!

Pourquoi j'en avais pas entendu parler?

Parce qu'il n'y a pas de véritable polémique sur ce sujet.

Alors oui, bien sûr, y'a des illuminés qui ont écrit des menaces de mort aux membres du Parlement soutenant la loi, ou qui ont raconté que les ténèbres s'abattraient sur la Nouvelle-Zélande si la loi passait, et autres grands moments de lolitude à base de "si on a la sécheresse c'est la faute à votre satanée loi".

MAIS, et c'est quand même la grande différence culturelle avec ce que je peux entrevoir des débats houleux qui agitent la France en ce moment : tout le monde s'en fout.

Globalement, les Kiwis ont choisi, dans leur esprit très relax de toujours, de ne simplement pas s'intéresser à une loi qui ne va absolument rien changer dans leur vie.

Et c'est pour ça qu'il n'y a eu ici ni polémique, ni manifestations, ni même mini-débats au comptoir du café du commerce : parce que les gens estiment qu'ils n'ont pas à discuter de ce qui ne les concerne pas. Que ce n'est pas à eux de juger ce que deux adultes consentants ont envie de faire de leur vie.

Et, franchement, ce matin, j'étais fière de mon pays d'adoption.

J'étais fière de voir que la déclaration de la loi avait été accueillie comme ça :


Et pas par  des députés en train de se bagarrer comme des collégiens.

Et comme je suis sympa, je te cite les meilleurs morceaux de l'article en lien, si jamais t'as la flemme de lire :  

"Une grimace qui a provoqué l'ire des élus UMP – dont, surtout, d'Yves Albarello (UMP, Seine-et-Marne) – qui ont fondu sur lui (...) au cri de "ce n'est pas le lobby LGBT qui gouverne !". "En tentant de s'interposer, un huissier aurait reçu un coup" et le meilleur pour la fin : "M. Albarello se plaindra par la suite d'avoir été "agressé par les socialistes" qui lui auraient "cassé[ses] lunettes".

(Voilà voilà. Ces gens représentent le peuple de France.)

Je suis fière de voir que les Kiwis ont géré ce texte de loi, pas comme une incitation à la haine et à la violence,



Pas comme un appel à la négation des droits les plus fondamentaux du respect de l'autre,



En somme, pas comme des gros cons :




(Y'a du niveau)

Mais que les Kiwis ont abordé ce texte comme ce qu'il est : une simple proposition. Pas une menace, pas une punition, pas une injustice. Juste une proposition de rétablir une facette de l'égalité sociale. Donner l'occasion à des adultes consentants de s'unir devant la loi au même titres que tous les autres. Rien de plus.

Je sais que je n'apporte pas d'eau au moulin avec cet article et que mes propos sont ultra-banals (banaux?) (d'où la décision de le publier à chaud, parce que si j'attends une nuit, je vais le supprimer, vu qu'il n'apporte rien et en plus je fais même pas des blagues dedans), mais voilà, des fois, il faut que ça sorte.

Aujourd'hui, j'ai trouvé une raison de plus d'aimer ce pays.

Je termine sur le discours le plus génial du moment (with the Kiwi ixent en prime) (accroche-toi à ton sloup, ta perception des voyelles de la langue anglaise va basculer dans les abysses), et surtout un discours tellement Kiwi de tellement de manières (blaguounettes au Parlement et ambiance Bisounours, bienvenue en Nouvelle-Zélande) :




Et j'espère de tout mon coeur (et avec beaucoup de naïveté) entendre les mêmes mots prononcés en France dans les prochains jours.

(Aussi, et surtout, pour qu'on puisse commencer à parler d'autre chose.)

dimanche 14 avril 2013

Life, the universe, and everything.



Depuis que j'ai emménagé à Auckland, ma vie est plus ou moins la même qu'en Alsace.

Je me lève, je prends mon bus, je bosse, je rentre à la maison, je joue au PC, Flaxou me fait à manger et je corrige ses lettres de motivation. Oui, c'est plus ou moins exactement la vie qu'on avait à Strasbourg (juste avec moins d'amis). (Mais j'ai pas besoin d'amis en Nouvelle-Zélande. Mon PC il a Facebook, c'est bon.)

Y'a juste quelques petits détails qui sont là de temps en temps pour me rappeler que je suis dans un autre pays : les palmiers devant mon arrêt de bus. Les gens pieds nus dans la rue à 8 heures du mat' qui vont au travail. Les matins quand je sens l'odeur de la mer en sortant de chez moi (même si je la vois pas). (Tu veux pas encore que j'aie une maison avec vue sur la mer? je suis pas Jérôme Cahuzac, merci bien.)

(Oui, je suis les actualités françaises. Les actualités Kiwies, on a vite fait le tour : du sport, des faits divers, du sport, du sport, et au fait on vous avait parlé de sport ou pas? je me souviens pas. Bon, dans le doute, on va vous parler de sport.)

(Sérieusement, faut le voir pour le croire. TOUS les sports qui se déroulent vaguement en Australasie passent au journal. Même les équipes féminines juniors de ligue 3 de netball ont droit à leur 15 minutes au journal national!)

Mais, ce qui m'aide à me souvenir que je suis à l'autre bout du monde dans un pays ultra cool (et pas coincée en Europe dans le sixième mois consécutif d'hiver), c'est les petites excusions en terre inconnue qu'on se paye de temps en temps avec Flaxou.

Depuis notre grand road trip de décembre, on n'a plus eu le temps (ou la thune) de bouger vraiment loin. Heureusement, la Nouvelle-Zélande est un petit pays, et on a bien fait exprès de ne pas inclure Auckland et les 200 km à la ronde dans notre tour initial du pays, histoire de se ménager du suspense pour la suite.

Ainsi, le week-end dernier, on a repris nos sacs de rando et nos boîtes de bouffe pour chat (quand tu sors à plus de 50 km d'une ville, c'est indispensable d'emporter de la bouffe et une jerricane d'essence, parce que des fois, t'as des surprises). 

Et on est allés passer le week-end à Coromandel Peninsula.

Coromandel Peninsula, à deux heures de route d'Auckland, c'est un petit coin de bush et de plage comme la Nouvelle-Zélande sait si bien les faire, avec, paumés au milieu, une "ville" de 30 pékins avec deux auberges de jeunesse et trois restaus à emporter qui ne font que du fish&chips ou des burgers (les deux grands plats nationaux de la Nouvelle-Zélande) (oui, c'est assez ironique).

Alors, comme d'habitude, on a visité des petites plages désertes, ça en devient presque lassant tellement on a pris l'habitude.


En plus Cathedral Cove c'était bondé, mais alors, y'avait genre VINGT personnes!


(Laisse tomber la neige comment on s'est barrés tout de suite.)

Par contre, le lendemain, on a visité des trucs un peu plus originaux. D'abord, on est allés à Paeroa, ville entièrement insignifiante et banale, et qui ne vaudrait absolument pas le détour, si ce n'est qu'elle est le lieu de naissance d'un véritable mythe Kiwi : le L&P.


Le L&P (de son nom complet Lemon&Paeroa), ce n'est ni plus ni moins que LA boisson préférée des Néo-Zélandais. C'est une limonade ma foi franchement bonne, mais c'est surtout un incontournable des sodas Kiwis : on en trouve partout, et tout le monde en boit. Il faut s'imaginer ça un peu comme le Coca-Cola dans n'importe quel autre pays. (D'ailleurs, je précise qu'on trouve aussi du Coca partout ici, faut pas croire que la Nouvelle-Zélande a échappé au rouleau compresseur.)

Mais le L&P reste tout de même la boisson gazeuse la plus consommée en Nouvelle-Zélande, ce qui a d'ailleurs poussé Coca-Cola à racheter l'entreprise familiale (je vous avais dit, on n'y échappe pas).

La particularité du L&P, c'est que, malgré son extrême popularité chez les Kiwis, on n'en trouve tout bonnement pas en dehors du pays. Ce qui a poussé les Kiwis, qui ne sont pas les derniers pour la déconne, à lui donner comme slogan "World Famous in New Zealand". (Un slogan depuis devenu célèbre et réutilisé moult et moult fois.) 

A Paeroa, on trouve donc des mémorandums de la célèbre boisson un peu partout : des affiches dans la rue, des bancs à l'office de tourisme :


Et surtout, cette statue qui nous salue à l'entrée de la ville, et qui motive à elle seule un voyage à Paeroa.


(Je ne déconne pas. Les gens font le détour juste pour voir cette bouteille. Y'avait genre 4 familles qui faisaient la queue pour prendre des photos quand on est arrivés.)

Après ce petit détour rafraîchissant, on s'est dirigés vers Karangahake Gorges, des anciennes mines d'or désormais abandonnées et ouvertes au public (certaines parties, du moins). Comme d'habitude, on y est allés à l'arrache (notre grande spécialité dans la vie) et on s'est retrouvés ici, à l'entrée des mines...



... Sans lampe de poche.

On a donc passés les deux heures suivantes à explorer des tunnels qui s'enfonçaient jusqu'au noyau terrestre (en tout cas c'était mon impression), éclairés avec un portable (un seul, j'avais pas pris le mien) avec 12% de batterie restante.

Autant te dire que j'ai passé tout le trajet à agripper le téléphone avec l'énergie du désespoir, priant tous les dieux de Tolkien pour que le téléphone ne nous lâche pas au milieu d'un dédale de tunnels souterrains, et en ayant de brusques flash-backs de The Descent à chaque fois qu'on croisait un caillou à l'air menaçant.

Mais sinon, c'était fun fun fun. Je me sentais un peu comme Fievel au Far West.



Et pour finir ce week-end en beauté, on est allés faire un tour à Hot Water Beach à marée basse (vers 23h). Cette plage a la particularité d'avoir des sources d'eau chaude juste sous la surface du sable, ce qui fait qu'en théorie, on peut y débarquer avec sa petite pelle, creuser un petit trou dans le sable, et hop! Jacuzzi gratuit!

Oui. En théorie.

En pratique, ça s'est traduit par Flaxou et moi débarquant sur un parking désert et entièrement plongé dans le noir (avec encore une fois pour seule source de lumière le téléphone portable, maintenant à 5% de batterie) (emmener son chargeur en week-end c'est pour les faibles, Flaxou il aime le challenge). On a trouvé l'escalier menant au sable à tâtons, et ensuite on s'est dirigés au son des vagues vers le bord de l'eau.

Quand soudain, Flaxou (en train de nous guider) pose son pied dans l'eau, et on se rend compte qu'on était au bord d'une étendue d'eau insondable, qui barrait le seul chemin d'accès à la plage.

Et là, Flaxou se tourne vers moi et dit :

- Bah c'est pas grave, on n'a qu'à enlever nos pantalons et traverser à gué.

Mais oui! Bien sûr!

Mettons-nous en maillot de bain par 15 degrés et traversons guillerettement une étendue d'eau noire à la profondeur insoupçonnable! 

Faisons fi de tous les instincts de conservation qui ont permis à notre espèce d'avancer assez loin pour inventer la physique nucléaire et bafouons toutes les lois de la logique en s'aventurant dans un état de la matière regorgeant sans nul doute de créatures qui veulent notre mort!

(Toutes les créatures marines veulent ta mort. Des requins aux oursins. TOUTES.)

Flaxou, pas échaudé par mon discours plein de bon sens, s'est contenté de hausser les épaules et d'entrer dans l'eau en m'abandonnant sur le rivage.

J'ai regardé la petite lumière de son téléphone s'éloigner de plus en plus, et puis je me suis dit que c'était en fin de compte encore pire de me retrouver toute seule dans le noir même si j'étais sur la terre ferme, parce qu'après tout y'a aussi des créatures terrestres qui veulent ta mort (les zombies).

Donc j'ai enlevé mon jean en frissonnant, j'ai noué mes chaussures autour de mon cou, et je suis entrée dans l'eau en priant tous les dieux de Tolkien pour qu'il n'y ait pas un requin embusqué derrière 20 centimètres d'eau. (C'est possible.)

J'étais à mi-chemin, l'eau avait déjà atteint mes cuisses, et j'étais un peu à ça de la crise d'angoisse, quand j'ai été sauvée par un truc.

Flaxou avait disparu derrière une dune. Je le savais parce que j'arrivais à voir cette dune. Je voyais aussi vaguement le bout de l'étendue de l'eau. Je me suis dit : comment je peux voir ça si Flaxou s'est barré comme un crevard avec la seule source de lumière?

Et c'est là que j'ai vu les reflets des étoiles dans l'eau.

J'avais pas pensé à lever la tête depuis qu'on était arrivés, trop préoccupée par le sable dans mes chaussures et essayer de pas me noyer dans un mètre d'eau.

Mais là, j'ai levé la tête, et j'ai vu le truc le plus dingue du monde.

J'ai vu le ciel.

Le VRAI ciel. 

Le ciel qu'il y a au-dessus de nos têtes toutes les nuits et qu'on ne voit jamais, je l'ai vu pour la première fois de ma vie.

J'ai vu tellement d'étoiles que c'était impossible de toutes les calibrer. J'ai vu des constellations que je ne reconnaissais pas, parce qu'elles existent pas en Europe. J'ai vu des étoiles blanches, des rouges, des jaunes. J'ai vu des étoiles filantes.

J'ai vu la voie lactée. 

LA PUTAIN DE VOIE LACTÉE!

Je savais même pas qu'on pouvait simplement voir la voie lactée, comme ça, tranquillou, sans instruments ni rien! Je pensais toujours que ce genre de photos étaient photoshopées!


(Tu te rends compte qu'on a la voie lactée juste au-dessus de nos gueules tous les jours de notre vie et qu'on la voit jamais? Bonjour la vie de merde.)

Après ma découverte du monde, de la vie et des mystères de l'univers, c'était donc un peu difficile d'apprécier les joies des sources d'eau chaude.

Surtout qu'on a passé une-demi heure à grelotter sur la plage en cherchant où est-ce qu'on avait chaud aux pieds pour savoir où creuser, et qu'ensuite, on s'est rendus compte que, non seulement c'était impossible de creuser une piscine parce que le sable arrêtait pas de tomber dans ce qu'on creusait, mais surtout que les sources étaient moins proches de la température "bain chaud" et plus proches de la température "MAGMA EN FUSION".

(J'ai encore les pieds qui pèlent des brûlures que je me suis infligée cette nuit-là.)

Mais c'était quand même chouette, parce qu'on a rencontré un bus de jeunes touristes prêts à partager leurs pelles et leurs bières, et donc on a discuté avec, les pieds dans de la flotte brûlante et les têtes en-dessous de la voie lactée, c'était quand même relativement sympathique comme expérience.

(Le retour était moins sympa. La marée avait monté et l'étendue d'eau a bien failli me tuer.)

(Jusqu'au menton! J'ai jamais été aussi profond dans l'eau de toute ma vie!)

Tout ça pour dire : dans ma vie quotidienne, des fois, j'oublie que je suis en Nouvelle-Zélande.

Heureusement, c'est un pays qui a une manière très agréable de se rappeler à toi.



PS : Je te jure, j'essaye de trouver des trucs désagréables à te raconter, pour que t'aies pas trop la haine de te peler les meules dans un pays de tarés où les citoyens manifestent contre l'égalité sociale pendant que les ministres se tirent avec la caisse. Mais j'y peux rien, c'est génial ici.

(Franchement, lecteur, déménage. Viens nous rejoindre, Flaxou et moi.)

(On plantera des choux à choucroute et de la cannelle et on fera une Alsace 2.0.)

mercredi 3 avril 2013

Brève pascale


Et donc comme c'était Pâques, Flaxou et moi (et nos amis) on a fêté ça de la manière traditionnelle Kiwie, et on est allés faire une balade en forêt.

(Toi aussi, fête les événements à la manière Kiwie! C'est très facile : d'octobre à mars, on va à la plage (avec une tente!) et on fait un barbecue. Le reste de l'année, on mange des choses rôties au four et puis on va faire une balade en forêt.)

On était dans la forêt et on chantait des chansons histoire de se donner du courage (y'avait une pente et j'ai plus fait de sport depuis le Bac en 2006).

Et là, j'entends Professeur Flaxou, tranquille au milieu des fougères, en train de chanter :

- Oh wimbowé, oh wimbowé, oh wimbowé, go Martinique...

(Alias : les paroles les plus yaourts de l'histoire du monde.)

Donc je me concentre pour capter l'air, puisque Professeur Flaxou n'a absolument pas d'oreille, mais quand je dis "pas d'oreille" je te jure que c'est à un point effrayant. (Il arrive même pas à fredonner une chanson, parce qu'il n'entend pas la différence entre les notes d'une gamme, donc le résultat, en général, est complètement méconnaissable.)

(Et je ne parle même pas de son problème de rythme. C'est quand même le seul fan de Star Wars qui n'arrive pas à chanter le générique parce qu'il confond les "PAM" longs et les "PAM" courts.)

Donc, après cinq minutes où je sèche toujours (ce qui est ironique parce qu'on s'était fait surprendre par une averse et que j'étais très mouillée) (LOL) je lui demande : mais dis donc, Flaxounet, c'est quoi donc ta chanson?

Et là Professeur Flaxou me dit :

- Ah mais je sais pas pourquoi je l'ai dans la tête! Tu sais, c'est la chanson "Go Martinique" là. Dans les films, les blacks ils chantent cette chanson tout le temps, à l'église et tout.
- A l'église? Ils chantent "Oh wimbowé go Martinique" à l'église?

Et là.

Réalisation soudaine de ce qu'était la chanson.



- Ah pardon Flaxou, je suis désolée, mais là, ça va sur le blog.
- Non, pas le blog! Ça mérite pas le blog! 

Moi je pense que si.

(Et j'en rigole encore.)