samedi 28 mars 2015

Brève canine


Depuis qu’on a Penny avec nous à la maison, je me suis réconciliée avec la gent canine.

Ça ne veut pas dire que je ne reste pas foncièrement une mémère à chats au plus profond de mon cœur (team chatons pour la life), mais bon, on va dire que je me suis mollifiée par rapport à mes sentiments de départ (ambiance « les chiens ça pue et c’est pourri »).

Car oui, je l’avoue, j’aime bien de temps en temps faire des balades avec Penny. J’aime bien jouer avec elle dans le jardin. Et, de temps en temps, je me suis même surprise à lui frotter les oreilles en disant :

- Qui c’est qui est un bon chien ? Oh oui ça c’est un bon chien !

Mais ça ne me donne pas envie d’adopter un chien pour autant, parce que c'est quand même beaucoup plus fun de regarder les autres galérer.

Richard et Maria, par exemple, ont développé deux styles bien distincts face à l’éducation de leur chien.

D’un côté, on a Richard, le disciplinaire raté. Et je dis « raté » parce qu’après un mois à l’école de dressage, où Penny était le pire chien du lot, la dernière session s’est soldée par un échec total, à savoir que Penny n’a même pas obéi a « Assis » ou « Couché ».

(Mais elle a quand même reçu son diplôme, parce qu’on est chez les Kiwis et qu’ici on te file des diplômes de tous les côtés du moment que tu payes plein de thunes et que tu essayes de tout ton cœur.)

(Oui, ça vaut pour les études universitaires aussi.)

La technique de dressage employée par Richard consiste donc à essayer de maintenir une discipline pendant environ huit secondes, et puis à laisser tomber.

À la maison, c’est donc tous les jours qu’on entend la douce mélodie du :

- Penny ! Viens ici ! Penny ! Penny ! Ici ! Non, pas là-bas ! Penny ! Reviens ! Sors de là ! Penny ! Allez, ça suffit maintenant ! Papa va se fâcher ! Penny ! Je compte jusqu’à trois !

Et puis à trois, il soupire, il va la chercher, et il la porte où il veut l’emmener.

(Rappelons que ce chien fait 25 kilos, donc c’est au moins un plan qui a l’avantage de servir de programme de muscu.)

Idem pour les jeux type « lutte », genre celui où le chien et le maître tirent chacun sur une extrémité de corde. Le guide de dressage que la SPA avait fourni à Richard et Maria quand ils ont adopté Penny spécifiait qu’il ne fallait jamais laisser le chien gagner à ce type de jeux, parce qu’il fallait montrer que le maître était l’alpha.

Du coup, quand je joue avec Penny, on lutte une quinzaine de minutes parce qu'elle est costaud et que je suis une chiffe molle, mais je fais bien attention de toujours gagner.

(Et, accessoirement, de faire une danse de la victoire en agitant la corde devant elle et en criant C’EST QUI LE PATRON ?)

(Mais je crois que ça, c’est pas nécessaire).

Richard, lui, quand il joue avec Penny, attrape la corde pendant une-demi seconde et puis la lâche. Du coup, ben c’est clairement elle l’alpha, donc forcément, pour l’obéissance, on repassera.

D’autant que Richard est un grand flippé de l’autorité, genre il a peur que son chien soit traumatisé à jamais si on le soumet à un peu trop de fermeté.

(Alors que bon, c’est un chien quoi, c’est pas vraiment les êtres les plus farouchement individualistes du monde, on est d’accord.)

Du coup, dès que je réprimande Penny quand elle touche à mes affaires (à savoir : j’agite le doigt en disant « Pas bien ! Vilaine Penny ! ») (ce qui n’est pas non plus du disciplinage hardcore, tu l’admettras), eh ben je vois Richard débarquer tout affolé en disant :

- Oh là là oh là là mais qu’est-ce qui se passe ?
- Oh, pas grand-chose, Penny a chouré mes chaussettes.
- Oooooh ! Mais c’est parce qu’elle t’aime bien.



- Ouais okay, peut-être, mais c’est mes chaussettes, et elle met de la bave dessus.
- Et c’est pour ça que tu la grondais ?
- Ben oui.

Et là, Richard me regarde d’un air interloqué, puis dit :

- Bon allez Penny, viens avec papa maintenant, tu embêtes Charlotte.

Et quand elle ne vient pas (vu que ce chien ne vient jamais quand on l’appelle), il la prend dans ses bras, puis je l’entends quitter la pièce en disant :

- Là, là, ma princesse, tout va bien mon cœur, c’est fini.

De la discipline de fer, donc.

Encore que, je chambre Richard, mais il faut au moins reconnaître qu’il tente d’instaurer un semblant de discipline. Maria, elle, ne fait même pas semblant.

Car le style de Maria est plutôt « mère poule », mais pas « mère poule » laïque, hein !

Nan, « mère poule » genre JE VAIS ÉTOUFFER AVEC MON AMOUR ET APRES TU NE ME QUITTERAS JAMAIS PARCE QUE TU SERAS MORT AHAHAHAHA.

Sérieusement, elle ne laisse pas Penny hors de sa vue une seule seconde.

Et c’est littéralement « UNE SEULE SECONDE ».

Des fois, je suis dans ma chambre, ou dans le jardin, ou à la salle de bains, et je vois Penny qui débarque pour venir me lécher les mollets en frétillant de la queue. Eh bien, je compte dans ma tête, et ça ne manque jamais : une à deux secondes après que le chien débarque, j’entends Maria qui crie au meurtre :

- Penny ? Penny ? Où es-tu ? Penny ! Viens ici que je puisse te voir ! Penny ! Penny ! Penny !



Et, quand j’ai demandé à Maria pourquoi c’était si important pour elle d’avoir Penny sous les yeux en permanence, elle m’a répondu :

-  J’aime pas qu’elle soit dans le jardin toute seule parce que j’ai peur que quelqu’un vienne la kidnapper.

Alors, bon. 

Admettons.

Admettons que la pratique de kidnapping des chiens soit un truc répandu en Nouvelle-Zélande. 

Admettons aussi que des kidnappeurs de chiens traînent dans notre quartier et soient justement en train de passer dans notre ruelle loin de tout alors même que Penny est toute seule dans le jardin. 

Admettons enfin que les kidnappeurs de chiens voient Penny dans le jardin malgré la barrière de trois mètres de haut qui entoure la maison.

Mais ne même en admettant tout ça, les kidnappeurs de chiens, ils voudront jamais de ton clébard, à part pour en faire de la soupe !

Sérieusement, c’est un chien de gouttière ! Si déjà tu t’amuses à kidnapper les chiens, tu vas en prendre des qui ont un putain de pedigree, qui peuvent se revendre ! Tu vas pas t’amuser à aller kidnapper tous les bâtards qui trainent dans les coins de rue !

Mais quand j’ai fait la remarque à Maria, elle m’a juste répondu :

- Oui, mais Penny, on dirait un chien de race. Elle est tellement belle !

(Okay, c’est ma faute aussi, j’ai essayé d’utiliser des arguments logiques.)

(C’est  comme d’amener un couteau à une bagarre de flingues.)

Et cette angoisse par rapport au chien, Maria ne s’en sépare jamais. Par exemple, un jour, elle a par mégarde marché sur la patte de Penny. Eh bien, deux heures après :

- Charlotte ? Je peux te demander ton avis ?
- Oui, quoi ?
- Regarde Penny. Elle boite, non ?
- Je trouve pas.
- Regarde mieux.

- Effectivement, elle boite très légèrement de la patte gauche.
- Okay, c’est décidé, j’appelle le vétérinaire.

Sérieusement ? 

Même quand j’ai bu du mercurochrome, mes parents ont attendu plus longtemps que ça avant d’appeler le docteur !

(Bon, ça en dit peut-être plus long sur mes parents que sur Maria, mais quand même.)

Mais ce n’est pas une décision qui m’étonne, puisque Maria a une relation complètement fusionnelle avec Penny. Tellement fusionnelle qu’elle transfère tout ce qu’elle ressent à son chien.

Par exemple, quand elle l’emmène en balade, elle fait le tour du pâté de maisons une fois puis revient aussitôt parce qu’elle est fatiguée. Elle se pointe donc à la maison toute essoufflée, avec une Penny complètement surexcitée à ses côtés, et me dit en haletant :

- Ah, on a fait une belle balade ! Penny est épuisée !

Pendant que le chien est LITTÉRALEMENT en train de courir et de sauter partout.

Puis elle annonce :

- Ah, elle court partout, c’est parce qu’elle est fatiguée. Allez Penny, c’est l’heure de la sieste ! Viens manger ta friandise !

(Oui, comme Maria ne peut pas porter le chien, elle a trouvé une autre tactique : chaque fois qu’elle veut mettre Penny dans sa cage, elle lui donne une friandise.)

(Une discipline de fer, bis.)

Idem pour la bouffe : Maria est en effet persuadée que Penny doit manger trois fois par jour, puisqu’elle et Richard mangent trois fois par jour. Du coup, tous les matins, c’est la même ritournelle :

- Je comprends pas, je lui ai donné son petit déjeuner il y a trois heures, et elle n’y a même pas touché ! C’était pareil hier, et avant-hier ! Elle est peut-être malade ?
- Oui, alors elle a peut-être juste pas faim, parce que c’est un chien et pas un humain, et que c’est un truc d’humain de manger quand on n’a pas faim.
- Mmmmh.

(Serait-ce une pause de réflexion ?)

- Non, je pense qu’elle est malade.

(Ah non.)

- Tu l’as pas encore amenée chez le vétérinaire ? Ça m’étonne.
- Si, il m’a dit qu’elle était en bonne santé. Mais je pense que je vais changer de vétérinaire, celui-là c’est un charlatan.
- Pourquoi ?
- Il a dit de lui donner à manger une fois par jour ! Une fois par jour ! Mais c’est ridicule, elle va mourir de faim ! Tu imagines si on ne te donnait à manger qu’une fois par jour ?

Oui j’imagine, mais ce n’est pas comparable puisque Penny est un CHIEN ! Elle a un métabolisme complètement différent ! Je veux bien qu’on ait pas mal de gènes en commun et que sur l’échelle des êtres vivants on soit assez proches, mais faut pas déconner non plus, merde ! Tes poissons rouges aussi, tu les nourris trois fois par jour ?

Pardon, je ventile, mais faut bien que ça sorte quelque part.

Et tu imagines un peu l’état de Professeur Flaxou le scientifique quand il entend des arguments de ce type. Du genre l’autre jour, quand Maria a récupéré un énième chausson mâchouillé, et nous a dit :

- Ce chien est vraiment trop mal élevé, franchement.

Nous on était en train de se regarder, en mode :



Puis elle a continué en disant :

- Mais en même temps, elle est tellement forte tête, c’est impossible de la faire obéir.

Chose à laquelle on n’a pas pu s’empêcher de répondre en chœur :

- Si, c’est possible.
- C’est clairement possible.
- C’est l’animal le plus facile au monde à faire obéir.
- C’est le but de toute l’espèce.
- C’est la raison première de leur existence sur terre : ils sont obéissants.
- De nature.
- Sinon ce serait des loups.




(Et toc.)


Arguments que Maria a considérés pendant une-demi seconde, avant de dire :

- Oui mais Penny c’était un chien de rue ! Elle était sauvage. Du coup, vouloir la dresser, c’est un peu comme de vouloir dresser un loup.

Ah ouais, dis donc.

C’est vrai qu’elle a l’air trop sauvage, tiens :


C’est vrai que les deux jours et demi qu’elle a passés à vivre dans la rue avant d’être secourue par la SPA ont dû en faire une MACHINE À TUER, dis donc.




(Thug life.)

Par ailleurs, j’ai l’impression que Maria a tendance à penser que Penny est beaucoup plus bête ou beaucoup plus intelligente qu’elle ne l’est.

(Un extrême ou l’autre, mais jamais le milieu.)

Par exemple, quand elle ne veut pas que Penny entre dans la cuisine, elle ferme la porte-fenêtre, et ensuite s’extasie sur l’intelligence de Penny quand celle-ci fait le tour du jardin pour passer par la porte principale, que Maria avait laissée ouverte. 

Alors que franchement, le principe de contourner un obstacle, voilà quoi, c’est un chien, pas un Sim.

Mais de l’autre cote, elle dresse des règles ultra complexes, du style :

- Tiens, je croyais que Penny n’avait pas le droit de dormir sur le lit.
- Si, elle a le droit, mais seulement quand les draps sont sales.

Alors pardon, mais si tu veux une recette pour rendre ton chien bien angoissé de la vie, je pense que lui autoriser et interdire alternativement un truc, c’est le meilleur moyen.

Parce que Penny, elle n’arrivera jamais à comprendre la différence entre des draps propres et des draps sales. Moi ça fait neuf ans que je suis avec Professeur Flaxou, et j’ai toujours pas réussi a lui faire comprendre la différence entre des draps propres et des draps sales.

(Le mec, avant de me rencontrer, il changeait ses draps deux fois par an, quand il passait de la couette d’hiver à la couette d’été, mais après il disait que moi j’étais dégueulasse, parce que je me lavais pas les cheveux tous les jours.)

(C’est un homme plein de mystères.)

Mais bon, on se moque, on se moque, mais après tout, Penny est quand même un chien tolérable. Elle n’aboie pas, elle ne mord pas, elle ne fait pas ses besoins dans la maison, donc à la limite, qu’elle ne vienne pas au pied, c’est pas notre problème.


Non, ce qui est surtout fun, c’est que Professeur Flaxou et moi, on a le beau rôle des observateurs qui n’ont pas besoin de s’impliquer du tout, et qui peuvent juste juger les autres bien fort et ricaner dans leur barbe comme des gros bâtards.

(Ah ouais mais on est Français ou on l’est pas, hein.)

Et toi, t’as des gens dans ton entourage qui laissent tout faire à leurs animaux de compagnie?

(Allez, lâche-toi, je sais que ça te démange.)

vendredi 13 mars 2015

Brève Littéraire


Comme je prends le bus tous les jours, je lis pas mal de bouquins dans le temps de latence.

D’autant que les chauffeurs de bus, comme tous les Kiwis, prennent la vie à la cool, et donc c’est nécessaire d’être concentrée sur autre chose que le voyage si mon petit cerveau germanique ne veut pas faire un anévrisme.

(C’est quand même le premier pays où j’ai vu des bus partir avec dix minutes de retard dès le départ du circuit, parce que le chauffeur était arrivé au terminus, avait garé son bus, et était parti se chercher un café au Mac Do en disant aux passagers qui grimpaient dans le bus « J’en ai pour pas longtemps, installez-vous donc en attendant ».)

(Et les passagers qui répondent « Ah mais bien sûr pas de souci Michel, prends même des frites si tu veux, nous on t’attend, cool concombre, y’a pas de malaise. »)

(Ces gens sont fous.)

Bref.

Donc je lis des bouquins dans le bus, que j’emprunte à la bibliothèque parce que les livres en Nouvelle-Zélande coûtent un million de dollars pièce.

(Bon, c’est pas réellement un million, mais 27 dollars pour un livre de poche, pardon mais c’est pas loin.)

(Pour les curieux qui se demanderaient le pourquoi du comment, c’est parce que le pays est trop petit pour avoir ses propres ateliers d’édition, donc tous les livres vendus en Nouvelle-Zélande sont importés soit d’Australie, soit directement des USA ou de Grande-Bretagne.)

Donc souvent, je vais à la bibliothèque et je prends au hasard des bouquins dans la sélection « le choix des libraires ».

Eh ben laisse tomber comment j’ai trop tiré le tiercé de la déprime ce mois-ci.

D’abord, mi-février, j’ai lu « The Bell Jar » de Sylvia Plath, et bon okay j’aurais peut-être dû me douter que c’était un bouquin déprimant quand la première page du livre te dit « Un mot sur l’auteur : Sylvia Plath a écrit un livre et puis elle s’est suicidée. »



Donc c’est l’histoire d’une jeune femme brillante à qui tout sourit, et puis elle tombe en dépression comme ça d’un coup (mais bon, elle a failli mourir d’intoxication alimentaire et puis ensuite un gars a essayé de la violer, perso à sa place je serais en dépression aussi) et puis bon ça va pas fort fort, mais comme c’est les années 50 on la met dans un asile et on lui fait des traitements aux électrochocs (wouuuuh, ambiance de folie !).

Donc tu comprendras qu’à la fin du livre, j’étais pas vraiment la joie de vivre incarnée.

D’autant que, comme j’étais curieuse, j’ai fait des recherches sur la vie de Sylvia Plath, et j’ai lu qu’elle s’était suicidée peu de temps après que son mari, Ted Hughes (aussi un écrivain) l’ait quittée pour une poétesse…. Qui s’est elle aussi suicidée six ans après Sylvia Plath, et de la même manière.

(Ça donne pas trop envie de se marier avec Ted Hughes, si tu veux mon avis.)

(Genre le gars tellement toxique que chaque femme qui l’approche abandonne toute envie de vivre.)

(C’est un peu le Jean-Jacques Rousseau des temps modernes.)

Bref bref.

Du coup, pour me remonter le moral, je suis passée directement à mon livre suivant : un bouquin d’un auteur Kiwi, Lloyd Jones, qui s’intitule « Mister Pip », et v’là la couverture bien rassurante à base de jolies fleurs et de petits oiseaux :



L’histoire en elle-même se concentre sur la vie d’un petit village de Papouasie Nouvelle-Guinée (sur l’île de Bougainville) et est raconté du point de vue d’une jeune fille, Matilda. Suite à une insurrection de rebelles, les enfants du village se retrouvent avec l’énigmatique Mr Watts comme professeur (car il est le seul Blanc qui reste – tous les autres ont fui le pays). Mr Watts a une grande passion dans la vie : Charles Dickens, et plus particulièrement son roman Great Expectations (De Grandes Espérances).

Donc les trois quarts du bouquin, c’est ça : Mr Watts qui apprend aux enfants de l’île à aimer la littérature. Y’a bien des rebelles armés qui arrivent de temps en temps dans le village, mais les habitants restent dignes et Mr Watts calme les soldats en leur racontant des histoires, c’est très mignon et bon enfant et puis TOUT LE MONDE MEURT.

Sérieusement, au bout de presque deux cent pages de bouquin, et alors qu’on ne s’y attendait plus, les militaires débarquent dans le village, butent Mr Watts,  le découpent en morceaux à la machette et le donnent à bouffer aux cochons.



(Ambiance.)

Donc moi j’étais devant le bouquin en mode « Game of Thrones » (c’est comme ça que j’ai appelé l’action de lire un passage cinquante fois de suite le temps d’imprimer ce qui vient de se passer). Parce que, au milieu du style d’écriture enfantin et optimiste, je t’assure que le coup de se faire découper à la machette tu l’avais pas vu venir.

Et juste quand tu te dis que dis donc c’est devenu sacrement dark d’un seul coup cette histoire, eh ben devine quoi c’est pas fini !

Nan parce qu’après, les soldats chopent la mère de la gamine, la violent sous ses yeux, et puis ils l’emmènent dans la jungle pour se faire également découper et manger par les cochons.




(AHAHA TROP COOL LA VIE.)

Bon, je te rassure, ça finit pas trop horriblement pour Matilda (sans compter les cicatrices émotionnelles qui vont la hanter le restant de sa vie bien sûr), parce qu’elle se fait secourir par des gentils et va vivre en Australie avec son père, et puis elle fait des études universitaires et devient une spécialiste de Charles Dickens.

(D’aucuns diraient qu’elle aurait aussi pu se trouver un boulot utile tant qu’à faire, m’enfin elle a eu une enfance difficile alors c’est bon ta gueule.)

Donc c’était quand même un bon bouquin, et je te le recommanderais si je ne t’avais pas spoilé toute la fin (HA HA !) mais je pense que tu ne m’en voudras pas puisque le livre n’a pas été traduit en français et que, même en anglais, il est assez dur à trouver hors de la Nouvelle-Zélande.

(Fun fact : le bouquin a aussi été adapté en film - sorti en Nouvelle-Zélande uniquement – avec Hugh Laurie dans le rôle de Mr Watts. Je l’ai pas vu mais il parait qu’il est seulement moyen, alors tu rates pas grand-chose.)

J’ai quand même deux mots à dire à l’auteur :

Pardon Lloyd Jones mais je me sens super trahie par ta couverture bleue pâle pleine de petits oiseaux, je m’attendais a une histoire bien mignonne mais tu m’as carrément taclé dans l’estomac avec tes histoires de gens coupés en morceaux, je suis à peu près sûre que c’était le but et je trouve que c’est du génie pur, et franchement je serais bien opé pour lire tes autres bouquins, mais là va falloir me donner un peu de temps pour me remettre de ton POIGNARD DANS LE DOS.

(C’est incroyable comme les écrivains peuvent te faire les pires coups de pute et après tu les aimes encore plus.)

(Je propose qu’on appelle ça le Syndrome George R.R. Martin.)

(Ouais je sais je parle beaucoup de Game of Thrones mais ça fait bientôt un an sans nouveaux épisodes et puis encore au moins deux ans avant The Winds of Winter, alors excuse-moi si je pars un peu en couille, c’est le manque.)

(On se reparlera en Avril et ça ira déjà un peu mieux.)

Bref bref Brejnev.

Après toute cette ambiance « balle dans l’slip », je me suis donc installée pour lire le troisième bouquin que j’avais emprunté pour le mois, et qui était une surprise, courtoisie de l’idée de génie de la bibliothèque et de son initiative « Have a blind date with a book for Valentine’s Day ».

Le principe était simple : la semaine de la Saint Valentin, la bibliothèque a érigé un grand présentoir sur lequel étaient placés des livres enveloppés dans du papier kraft, avec juste le code-barre qui dépassait, et une étiquette qui donnait une vague idée du thème (du genre « love is crazy », « love is a fantasy », « love is cruel » etc.)

Bon.

J’ai jeté mon dévolu sur « love is cold » parce qu’on était en plein dans « la semaine de la canicule » (AKA ce que les Aucklandais appellent les cinq jours dans l’année ou il fait plus de 25 degrés) (il faisait 26 degrés) et je me disais que ça ferait ton sur ton.

Ah ben laisse-moi te dire que j’ai pas été déçue, parce que c’était un polar qui se passait en Alaska et qui commençait cash avec un meurtre d’enfant.



(Joie de vivre.)

Tu me diras, où est le « love » dans tout ça ? Eh ben c’est parce que l’enfant a été tué par sa propre mère (dis donc c’est de plus en plus la fête) et que l’histoire se concentre sur le père qui revient de son déploiement en Irak (oui, hein, y’a la guerre aussi, sinon ce serait trop guilleret) et revit son histoire d’amour en cherchant dans sa mémoire les raisons pour comprendre comment sa femme a pu commettre cet acte.

Sauf qu’ensuite il se met lui aussi à tuer tout le monde durant la quête de sa femme, et puis il la retrouve et ils partent vivre heureux dans la taïga loin de la police, et ah ouais je l’avais pas mentionné mais en fait à la fin on apprend qu’ils sont frère et sœur.


(Ah mais quand je te disais que c’était l’ambiance de ouf, c’était pas de la blague.)

Et tout ça nous amène au dernier livre de la fournée, le clou de la sélection de ce mois-ci : « We Need New Names » de NoViolet Bulawayo.



Et là je vais pas te spoiler parce que ce livre est vraiment super bien écrit et absolument magnifique du début à la fin, et j’espère que tu le liras (et que le monde entier le lira), mais disons juste qu’il commence avec ça :


"When is she going to have the baby anyway? Bastard says. Bastard doesn't like it when we have to stop doing things because of Chipo's stomach. He even tried to get us not to play with her altogether.
She'll have it one day, I say, speaking for Chipo because she doesn't talk anymore. She is not mute-mute; it's just that when her stomach started showing, she stopped talking.
Who put it in there, Chipo? Tell us, we won't tell.
Chipo looks at the sky. There is a tear in her one eye, but it's only a small one."

Voilà voilà.


Donc là, j’ai fini mes bouquins pour le mois (miraculeusement sans me jeter par la fenêtre) (de toute façon toutes les maisons dans ce pays sont au rez-de-chaussée alors ça me ferait une belle jambe), et je retourne à la bibliothèque bientôt pour refaire le plein.

Mais comme j’en ai un peu marre de la déprime, j’ai décidé de faire un appel à témoins :

Cher lecteur, chère lectrice, si tu connais des bouquins qui donnent la joie de vivre, c’est le moment ou jamais de faire tourner les titres, parce que j’en ai un peu ma claque des électrochocs, des enfants congelés, des gens découpés à la machette et des viols sur mineurs.

STOP.

Il me faut des sourires, il me faut des bébés loutres, il me faut de l'amour, il me faut des pandas roux qui jouent dans la neige. 

Donc fais péter les suggestions d’œuvres qui donnent la banane. Ça peut être des livres en anglais ou en français, même en finnois si tu veux (mais par contre faudra pas m’en vouloir pour pas le lire en VO).

Bref, si jamais tu connais un livre qui donne la pêche, c’est le moment ou jamais, fais-toi plaiz, fais tourner la joie et l’amour.

(Après si tu veux on se donne rendez-vous une fois que je l’ai lu et on fera des rondes dans les prairies avec des chatons.)

À vos suggestions !

vendredi 6 mars 2015

L'Instant Kiwi: Un week-end au Tongariro


Le week-end dernier, Professeur Flaxou et moi, on avait envie de challenge.

Alors on s’est dit tiens, c’est encore l’été, il va faire beau, si on se faisait le Tongariro Crossing.

Le Tongariro Crossing, c’est quoi ?

C’est un circuit de rando d’une journée, situé, comme son nom l’indique, au beau milieu du parc national du Tongariro (au centre de l'Ile du Nord). La balade consiste à escalader un volcan, jouer un peu dans les cratères, et puis redescendre.

Le Tongariro Crossing est considéré comme la plus belle randonnée d’une journée à faire en Nouvelle-Zélande, et (si l’on en croit les offices de tourisme Kiwies) l’une des plus majestueuses et grandioses merveilles de l’univers et du multivers réunis.

(Ouais, ils sont parfois un peu dithyrambiques.)

Il n’en reste que le Tongariro Crossing a une réputation légitime de rando bien bien cool (ambiance deux mille visiteurs par jour) et donc l’histoire de merveille c’est quand même pas tout du chiqué.

Du coup le Tongariro Crossing, on parle de le faire depuis deux ans.

On en parle, on en parle, mais on le fait pas.

Pourquoi ?

Déjà parce qu’on est des mous du bide et que la rando dure entre six et huit heures (et que je m’essouffle déjà quand je marche jusqu’à l’arrêt de bus un peu vite), mais surtout parce que le Département de la Conservation (qui gère le parc national dans lequel est situé le circuit) en rajoute des tonnes avec leurs avertissements, ambiance « Si tu fais pas des marathons tous les trois jours laisse tomber tu vas carrément mourir direct fossilisé sur place, et ta pauvre mère te reconnaîtra qu’à la couleur de ton petit coupe-vent ».



(Ambiance.)

Du coup, on était un peu refroidis par la perspective de devoir appeler un hélicoptère pour qu’il vienne nous chercher parce qu’on était trop nuls et mous pour finir une rando.

Mais au fil du temps, j’ai réalisé qu’il y avait un écart assez énorme entre les avertissements du Département de la Conservation et ce que j’entendais autour de moi.

Par exemple, le DOC te dit que le Tongariro Crossing c’est difficile et seulement adapté aux alpinistes médaillés olympiques, mais une de mes collègues l’a fait avec ses parents sexagénaires.

Bon, alors là je me disais, je connais pas ses parents, si ça se trouve c’est grave des sportifs de la mort et ils mangent que des graines depuis trente ans, moi tu me mets à côté et ils me réduisent en poussière pour en faire des barres énergétiques.

Sauf qu’après j’ai entendu qu’un autre collègue avait fait le Crossing avec sa petite nièce de huit ans, et là pardon, j’ai pas une super grande confiance en mes capacités physiques mais je pense que je peux quand même égaler un môme d’un mètre dix qui a encore des dents de lait, merde.

Alors on a fait fi des avertissements, on a réservé la dernière chambre du dernier hôtel, et je me suis mis en mode « gros préparatifs » pour la rando du siècle.

Car oui, j’étais peut-être un peu en panique au moment de faire les bagages pour la rando, puisque de un c’était ma première longue rando, et que de deux, le Département de la Conservation mettait bien la pression avec sa liste interminable de choses essentielles à avoir sur soi :

J’ai quand même laissé tomber l’idée de se trimballer avec une tente sur le dos pour une rando de huit heures (c'était conseillé sur un des sites) parce que faut pas déconner non plus, mais pour le reste, j’ai quand même excellé dans le « cas où ».

Nos sacs une fois prêts contenaient donc les essentiels (chapeaux, crème solaire, chaussures de marche, coupe-vent) et à peu près un million d’articles « au cas où », du style :

- Trois litres d’eau par personne, au cas où on suerait dix litres par heure et qu’il faille remplacer fissa toute cette eau perdue ;  
- Des pansements anti-ampoule, de l’Arnica et de la pommade cicatrisante, au cas où on aurait les pieds en sang ou les muscles en spasmes ;
- Une paire de leggings en merino (qui m’a coûtée la peau des yeux de la tête), un bonnet de ski, des gants en opossum et un pull en laine, au cas où, durant la journée, ça s’arrête subitement d’être l’été ;
- Des chaussettes de rechange, au cas où je sais pas, franchement là je suis au bout des explications logiques et rationnelles ;
- Et puis HUIT KILOS DE BOUFFE mais j’y reviendrai.

Et Professeur Flaxou, me diras-tu ? Eh ben il a fait comme il fait toujours : il est parti avec sa bite et son couteau il a fait avec le minimum.

- T’as besoin de chaussures de marche ?
- Pourquoi faire ? J’ai mes Rangers.
- Tu veux que je t’achète un pantalon de rando ?
- Pourquoi faire ? J’ai mon jean.

(Cet homme est fort économique.)

Mais quand même, je me sentais mal d’avoir dépensé trois mille boules en sous-vêtements thermiques je m’inquiétais pour son confort :

- Il risque de faire froid, tu veux pas que je t’achète au moins des leggings en laine ? Le jean ne te protégera pas du froid.
- J’ai fait du ski en jean. Tu penses qu’il va faire plus froid qu’au ski ?
- Ben… non.
- Ben voilà.

Du coup, vendredi soir, c’est chaud bouillants qu’on s’est tapés les 300 kilomètres de route de nuit pour être prêts dès le point du jour.

Car oui, le Crossing n’est pas une boucle (tu montes le volcan d’un côté et tu redescends de l’autre), donc la majorité des gens choisissent de réserver une navette qui les dépose au pied de la montagne et viennent les rechercher au retour.

Sauf que la navette, elle part TÔT.

Tôt comment ?

Tôt comme SIX HEURES DU MATIN.

Alors qu’on s’entende tout de suite : en lisant ça, tu te dis peut-être que c’est pas si terrible.

Mais perso, je crois que je ne me suis jamais levée aussi tôt dans ma vie quand c’était pas pour prendre un avion.

Et okay, peut-être qu’il y a des créatures en ce monde qui trouvent ça normal de se lever à cinq heures et demie du matin un samedi pour aller vadrouiller dans la cambrousse, mais si y’en a laisse-moi te dire que j’ai pas envie de les connaître, parce qu’à tous les coups c’est des gens qui font leurs propres yaourts probiotiques et qui ont une carte fidélité chez The North Face, et pour mon estime personnelle, je pense que c’est mieux si je continue à fréquenter des geeks et des sérivores et qu’on peut tous se rassurer mutuellement que c’est cool de passer un week-end en pyjama à manger des chips, et après tout qui a besoin de vivre au-delà de 50 ans, franchement ?

(Ouah, c’était la phrase la plus longue du monde.)

(Prends une minute pour reprendre ton souffle, et on continue.)

Donc le Tongariro Crossing était placé sous le signe des premières fois : première fois que je me lève volontairement avant neuf heures un samedi matin:



 Première fois que je commence une rando avant que le soleil se lève:



 Première fois que je marche plus de trois heures d’affilée:



 Première fois que je fais plus de dix kilomètres en une seule journée avec juste mes pieds.



(Sans jet pack ni rien du tout !)

On est partis avec plein d’enthousiasme, même s’il était six heures et demie du matin. Le soleil se levait derrière nous, le chemin montait en pente douce, et on n’a presque pas eu trop la honte de se faire doubler par huit mille personnes pendant qu’on marchait à la vitesse de deux escargots asthmatiques.





(Mais y’avait la flore alpine à prendre en photo, c’est quand même pas de notre faute !)

Et puis le soleil s’est doucement levé en même temps que la pente, et la balade est devenue au fur et à mesure plus difficile et plus jolie.






(Professeur Flaxou l’amoureux des cailloux était à fond à fond.)

Et avec tout ça il était déjà bien huit heures du matin, donc c’était le bon moment pour un petit déj.

Tu te rappelles plus haut quand j’ai dit que j’avais prévu huit kilos de bouffe ? Ben j’étais pas très loin de la réalité.

Parce qu’encore une fois, intimidée par l’idée de marcher une journée entière, je m’imaginais qu’on aurait besoin de genre neuf mille calories pour compenser tous ces efforts physiques. Du coup, en plus des sandwiches pour la pause de midi, j’avais aussi embarqué des dattes, des noix de macadamia, des pommes, et surtout : le lembas.

Le lembas, c’est le nom qu’a trouvé Flaxou pour définir les barres de céréales que j’avais préparé moi-même avec amour.

Car ouais, comme je voulais pas faire les choses à moitié, j’avais décidé de préparer des barres énergétiques de mes blanches mains. J’ai regardé les recettes sur Internet, mais au lieu d’en choisir juste une, je me suis dit : tiens, si je mettais tout ce qui a l’air bon dans le mélange et on verra ce que ça donne.

Ce que ça a donné, c’était ça :



Dans ces barres, on avait donc, en vrac : de l’avoine, de l’orge, du blé, du son, du millet, des raisins secs, des cerises confites, des pommes séchées, des pruneaux, des baies de cassis, des graines de potiron, et a peu près un million de noix (noisettes, noix, noix de cajou, noix du brésil, noix de pecan, amandes et macadamia), le tout retenu ensemble par un mélange de sucre caramélisé et de sirop d’érable.

Pour résumer : c’était bon, mais c’était lourd.

En gros, c’était du lembas.


L’avantage c’est que ça tient au corps, l’inconvénient c’est que j’en avais préparé douze et qu’au bout d’une, t’as mangé pour la journée.

Du coup maintenant, on fait plus de sport mais y’a encore du lembas plein le frigo, et laisse tomber si tu manges un truc pareil dans une journée sédentaire, c’est genre trente points Weight Watchers dans la face.

(Mais ça va, on a trouvé comment les fourguer : Flaxou les amène au boulot pour les filer à ses collègues sportifs.)

(On est passés à ça de devoir faire du sport régulièrement.)

(Fiou.)

Bref bref.

Je vais de ce pas répondre a la question que tout le monde (si) se pose :

Bon alors, finalement, le Tongariro Crossing, c’est comment ?

Eh ben c’est super cool, et c’est pas difficile pour un sou.


Alors bon, c’est sûr que ça grimpe pas mal et que ça descend bien sec, donc faut pas avoir une prothèse de la hanche ou des problèmes de genou/cheville



Mais franchement, n’importe quel mollasson qui n’a pas de handicap physique peut parfaitement faire le Tongariro Crossing sans plus de séquelles qu’une ampoule au talon.

(Sérieusement, si deux geeks sédentaires comme nous avons réussi, alors n’importe qui peut réussir.)

(Ceci était l’intervalle Rocky IV de cet article.)



Franchement, je me sentais carrément dupée en faisant cette balade et en réalisant qu’il y avait des vieux, des gamins, des gros, des maigres, et plein de pas doués de la vie. 

Limite j’étais vexée de pas être la seule mollassonne à faire cette rando qu’on m’avait vendue comme la grosse aventure pour alpinistes de l’extrême, alors que bon hein faut pas déconner, les mecs ont quand même mis des marches  partout des que ça grimpe un peu.

(Et même des rampes, à un endroit.)

(Quelle bande de salauds.)

Bon, après, c’est vrai aussi qu’on reprenait notre souffle genre tous les mètres et demi, et qu’on a complété le circuit en presque dix heures, alors que la brochure dit qu’il faut compter entre six et huit heures.

Mais quand même.

Ce qui est assez rigolo, c'est que, même une fois sur le terrain, le DOC était toujours un peu parano des randonneurs, et donc c'était la débauche de panneaux inquiétants, donc je te fais un petit top 3 ici:

Numéro 3: Le panneau qui t'indique la conduite à suivre en cas d'explosion volcanique sous tes pieds, ambiance "Que faire si le sol se fissure sous mes pieds et que le gouffre des enfers en fusion s'ouvre devant moi":



(Genre tu seras pas de toute façon mort dans les trois secondes suivant des explosions de cailloux ou des nuages de cendre.)

Numéro 2: Le panneau qui t'indique sympathiquement que, eh tu sais ce volcan actif sur lequel tu te balades depuis ce matin? Ben y'a une partie encore plus active que le reste et on va te faire passer dedans MAINTENANT!



("Ouais, okay, mais le chemin est super joli, juré!")

Et mon préféré, numéro 1: Le panneau qui te signale que t'es sur le point de traverser un pont au milieu d'une zone de lahar (coulées de boues très lourdes et très dangereuses) et qui t'indique gentiment qu'il faut tendre l'oreille quand tu es dans la zone dangereuse, des fois qu'une coulée de boue s'approche de toi à 200 kilomètres heure.


(Encore une fois, pas très utile, vu que si tu entends la coulée de boue venir, t'es probablement déjà cané.)

Je te rassure, on n'a eu aucun souci (même si j'avoue qu'une petite éruption aurait permis de pimenter un peu cet article, mais passons).

La rando en soi était super, faut dire qu’on était aidés par le temps radieux qui a duré toute la journée.



(Même si, pour le coup, j’ai enlevé mes leggings thermiques, mon bonnet de ski et mes gants en opossum au bout d’une-demi-heure de trajet.)

On a grimpé sur des sommets caillouteux :



On a vu des beaux cratères :



On a vu des trous qui fument :



On a vu des fleurs tenaces :



Et surtout, on j’ai eu un gros instant « Fan 2 » :

- Iiiiih Flaxou !
- Quoi ?
- Mais tu reconnais pas ?
- Quoi ?
- C’est la montagne !
- Quelle montagne ?
- LA montagne !!!



CETTE montagne, donc, c’est le Mont Ngauruhoe (à tes souhaits), aussi plus connue sous le nom beaucoup plus cool de MOUNT DOOM, et sous le nom complètement minable de « Montagne du Destin » (ci-mer les traducteurs francophones qui puent).



(Faut juste se l’imaginer avec des coulées de lave et un gros œil rouge pas trop loin, mais sinon, c’est comme si on y était.)

Et, en voyant les champs de cailloux a perte de vue, c’est également assez flagrant de se dire que les scènes de l’Emyn Muil ont été tournées tout près d’ici :


Pareil pour le Rangipo Desert, qui a été utilisé pour la plupart des scènes du Mordor :







(Franchement, presque.)

D’ailleurs, j’en profite pour caser ce petit instant de LOL sur Google Maps, qui n’est pas le dernier pour la déconne :


(À côté du club de rando catholique. Magistral.)

Et puis c'était l'arrivée au sommet, et la vue impériale du sommet:



- Cette formation rocheuse on dirait trop un vagin.
- Fla!

(Professeur Flaxou et le sens de la poésie.)

- Sérieusement, c'est carrément un vagin. 
- ....
- Mais à l'envers, parce que le bout qui dépasse en bas, ce serait le...
- Je te hais.

(Laisse tomber comment il a pourri mon groove.)

N'empêche que c'était quand même bien chouette d'être enfin arrivés en haut:



Mais bon, tout ça c’était bien joli, mais ce n’était rien comparé au clou de la journée : les célèbres « Emerald Lakes » :




Des lacs de cratère très jolis, à la couleur verte et turquoise (due aux concentrations chimiques du coin).


Résultat : c’est très beau, mais ça pue.


(Profite bien des photos, parce que crois-moi ça sentait pas la rose.)

C’est donc un peu en amont qu’on a fait la grosse pause de la journée, d’autant qu’on avait fait presque toute la montée, mais qu’il fallait quand même qu’on prenne des forces pour la descente dans la poussière de cendres.

Car les cendres, c’est sympa parce que c’est mou, mais c’est très légèrement casse-gueule.

J’ai donc ressorti des fonds de tiroir ma magistrale technique du chasse-neige, apprise a l’école de ski en 1995, et laisse-moi te dire tout de suite que j’en ai impressionné plus d’un :


(On rigole, on rigole, n’empêche que je suis presque pas tombée.)

Puis c'était la traversée du long désert de cailloux jusqu'au Blue Lake.



Et là, c'était le drame. 

- Fla.
- Quoi?
- Je dois faire pipi.

Parce que, dans le circuit du Tongariro, les gars c'est pas des sauvages, ils ont installé des toilettes.

(On est en Zélandie, rappelle-toi, ici on ne fait pas pipi dans la nature.)

(En plus c'est un parc national, et y'a déjà que trois graines dans tout le tas de cailloux, on va pas non plus les tuer à l'ammoniaque, on n'est pas des bêtes.)

Or donc il y a des toilettes, MAIS dans leur génie, le DOC a installé deux cabines au début du parcours et deux cabines à la fin.

Et, entre les deux, il n'y a RIEN.

Donc non seulement y'a l'équivalent de 4 heures de trajet (ce qui fait 6 heures pour nous autres les mous du bide) sans toilettes, mais faut pas non plus t'imaginer que tu peux aller te foutre discretos derrière un buisson. Car, comme le rappelle si élégamment le DOC lui-même, TOUT LE MONDE VA VOIR TES FESSES:




(Une manière très classe de te dire que tu peux pas espérer un peu de dignité.)

Alors bon, j'étais bien en train d'échafauder des plans pour m'abriter derrière un gros caillou deux minutes, sauf que derrière moi, y'avait ça:



Et devant moi, y'avait ça:


Autant te dire que la discrétion n'était pas assurée.

D'autant que, rappelons-le, le Tongariro Crossing est la rando la plus populaire de Nouvelle-Zélande, et qu'en été, on compte minimum mille personnes par jour, tu t'imagines donc bien que c'était assez difficile d'échapper aux regards.

(Et je refuse de me retrouver les fesses à l'air sur Youtube et qu'on dise encore que c'est les Français qui foutent la merde.)

Donc sur le reste des photos du circuit, faut m'imaginer en train de contracter tous les muscles de mon corps en priant tous les dieux de Tolkien pour que je me retrouve pas avec une vieille cystite de derrière les fagots.

(Glamour toujours.)

Donc on est descendus, on est descendus, et peu à peu la végétation est revenue, d'abord à coups de mousse:



Puis à coups de bruyères:




Puis à coups de petits buissons:




Et c'était le retour au bush luxuriant:






(Vers la fin, j'avoue qu'on était un peu claqués.)

Et c'était le retour triomphant au parking, couverts de sueur et de poussière et de larmes de sang.


Et le lendemain?




(Oh ben, ça allait.)

En conclusion: le Tongariro Crossing, c'est une randonnée super chouette. Si jamais tu es de passage en Nouvelle-Zélande, c'est vraiment un truc à faire et je te le conseille de bon coeur.

(Par contre, je ne viendrai pas avec toi.)

(Je veux bien faire du sport une fois l'an mais faut pas pousser mémé dans les orties non plus.)