dimanche 13 septembre 2015

Brève de vieille dame


Et sinon j’ai décidé de me mettre au jardinage.

J’ai donc officiellement mille ans.


Ajoute à ça que l’autre jour je suis allée à la gym – oui la gym ça se passe bien, merci de demander – et comme j’étais en avance pour la zumba, je me suis dit que j’allais tester un des nouveaux cours, comme ça, pour le fun.

Le cours s’appelait « Kickboxing crossfit », et si le titre n’avait pas suffi à me mettre la puce à l’oreille, l’instructrice au gabarit d’haltérophile est-allemande aurait certainement dû le faire.

(La meuf avait des biceps qui faisaient la taille de mes cuisses.)

Sauf que j’étais déjà entrée dans la salle et je voulais pas repartir comme une chochotte. 

Donc je me suis tapée l’entrainement des Navy Seals pendant une heure juste pour pas perdre la face, pas merci mon ego.

(La meuf nous a fait faire des élongations tout en portant des poids de 12 kilos, et des pompes.)

(DES POMPES !)

(Je suis une femme, pas un Viking.)

En plus l’instructrice était un peu chelou, elle nous faisait taper dans le vide, mais on aurait dit qu’elle, elle voyait des gens qu’il fallait attaquer :

- Donnez un grand coup de pied en arrière ! Mieux que ça ! Tapez dans les couilles ! Celles qui peuvent pas taper assez haut c’est pas grave. Tapez vers le bas, bien fort, et NIQUEZ-LUI LE GENOU A CE FILS DE PUTE !



(Mais, mais enfin, pourquoi j’irais taper des gens comme ça ?)

(Je suis une enfant de hippies moi, je ne suis qu’amour !)

- On donne un grand direct droit ! Prenez bien de l’amplitude, sinon vous lui ferez pas mal, au gars ! Emily, tu le touches à peine, là ! Donne un grand coup, paf ! Comme ça ! Droit dans son estomac de connard !

(Non mais Madame, si vous avez des comptes à régler avec la gent masculine, c’est votre problème, mais si vous pouviez arrêter de me dire de taper des mecs qui n’existent pas, ça m’arrangerait, merci.)

(Bon, j’ai appris par la suite que c’est la même nana qui donne les cours d’auto-défense, du coup, c’est tout de suite plus logique.)

Donc voilà, j’ai fait une heure de sport et j’ai marché comme une limace arthritique pendant huit jours.


(Bah oui mais faut pas trop m'en demander non plus)

En plus c’était mon jour de chance, c’était « Legs and Abs Day », donc youpi les courbatures jusque dans les fesses.

(Pour la plus grande joie de Professeur Flaxou, qui s’est amusé à me pétrir les miches pendant des jours, sous le prétexte que « Nan mais c’est pour t’aider, c’est pour détendre les muscles ».)

(Bizarrement, quand j’ai des courbatures aux mollets, il est vachement moins altruiste.)

Bref.


Du coup, je me comporte déjà comme une petite vieille dans tous les aspects de ma vie, et en plus aujourd'hui c'est mon anniversaire et mon dieu j’ai VINGT-SEPT ANS (laisse tomber la neige comment je suis une vieille pomme).



Du coup, je me suis dit que j’allais aller au bout de ma démarche de momification, et je me suis mise au jardinage.

Au départ j’y suis allée avec vachement d’enthousiasme, déjà parce que c’est la première fois de ma vie que j’ai un jardin rien qu’à moi, et d’autre part parce que quand j’étais petite, une de mes activités favorites chez mes grands-parents – en dehors de tirer à la carabine dans le grenier - c’était m’occuper du potager avec mon papapa.

Et sincèrement, on s’amusait comme des petits fous dans le potager. On bêchait la terre (super fun), on cherchait les miserla en fouillant dans la terre avec les doigts (ultra fun), on mettait de l’eau partout avec l’arrosoir (hypra fun), et quand je faisais trop n’importe quoi, papapa me disait qu’il allait me mettre dans le trou où il mettait les carottes pour l’hiver (un baril enfoncé dans le sol, rempli à moitié de sable, et avec un couvercle pour le fermer, autant te dire que le tout avait une vibe très « Silence des Agneaux »), et je savais bien qu’il le ferait jamais alors c’était le truc le plus fun du monde.

Donc j’avais de bons souvenir du jardinage, et je m’imaginais déjà croulant sous les fleurs et les fruits, notre coin de gazon un perpétuel jardin d’Eden.

Et bon, ben, disons qu’on est en chemin.




(Featuring Flaxou le serf.)

On a planté des fleurs dans le jardin de devant (ah ouais, c’est la classe, on a DEUX jardins !) et pour le moment c’est pas trop mal, y’a juste un plant de fleurs qui a crevé (et c’était celui à 99 cents – je ne suis pas étonnée). Et comme on avait des pierres volcaniques qui traînaient dans un coin, on les a alignées pour faire une bordure et éviter que le mec qui tond la pelouse ne nous sabote tout notre travail.

(C'est si difficile de gérer les domestiques.)

(Je comprends tellement mieux les problèmes de Downton Abbey maintenant.)

J’ai donc désormais dans mon jardin un plant de fleurs violettes, un plant de fleurs oranges, une plante native qui pour le moment n’a pas de fleurs mais parait-il que dans six mois elle en fera des très jolies, une bande de tulipes sans tête (juste des feuilles, en fait) et des graines de tournesol que j’avais amoureusement reparties à intervalles réguliers, et qui ont toutes décidées de germer en tas a un seul endroit.



(Du coup maintenant j’ai vingt pousses de tournesol sur dix centimètres d’espace, et un mètre de terre vide.)

À l’arrière, je me suis fait un potager aux petits oignons (d’ailleurs j’ai planté des oignons) (BLAGUE JARDINAGE).

D’abord j’ai dû arracher tout un carré de gazon pour accéder à la bonne terre en dessous (ci-mer le volcan au pied duquel on habite), c’était plutôt fun, j’avais un peu l’impression d’être dans Minecraft - en plus salissant.



(Le monde réel, cet étrange endroit.)

Et puis j’ai récupéré une palette sur le bord du chemin (on habite à côté de la zone industrielle, donc y’a tout le temps des palettes qui traînent), je l’ai cassée en petits morceaux, et j’ai mis les morceaux par terre pour diviser le potager en sections.




(Évidemment ce sera pourri dans trois semaines, mais en attendant, ça a de la gueule.)


Et bon, ça fait un mois, mes patates sont encore six pieds sous terre, et les graines d’oignons et d’épinards semblent avoir été bouffées par les oiseaux (paye ton pays sans mammifères). Mais la salade était sortie et avait une bonne gueule, donc j’étais quand même optimiste.

Jusqu’à ce que débarquent les LIMACES.

Parce que ouais, c’est dingue hein, mais dans un pays qui est en permanence à 90% d’humidité, y’a des limaces.

(C’est fou ce qu’on apprend quand on passe du temps a l’air libre.)

Du coup les salopes m’ont bouffé le seul machin qui était sorti de terre, alors au lieu d’avoir trois carrés de terre vide et un carré de salade, maintenant, j’ai quatre carrés de terre vide et une boîte de poison pour limaces.


Mais c’est pas grave, j’ai planté d’autres légumes pour voir s’ils pousseront mieux, et en attendant, je fais les trucs qu’on est censé faire quand on jardine : je hume l’odeur de la terre fraîchement retournée, j’enlève les mauvaises herbes, je case mon nouveau hobby dans les conversations pour pas qu’on pense que je suis une grosse otaku (genre tavu je passe du temps dehors et tout, je suis une vraie adulte responsable et saine) et, surtout, je scrute le ciel quinze fois par jour pour vérifier si y’aura besoin d’arroser les plantes.

(J’avais pas autant regardé le ciel depuis mon marathon Skyrim.)




(Pour ceux qui se demandent : c’est beaucoup moins joli IRL.)

Et sinon c’était aussi récemment nos trois ans de mariage avec Professeur Flaxou (laisse tomber comment on est trop des ancêtres). Je voulais donc fêter dignement nos noces de Froment (pire nom d’anniversaire de mariage au monde) (sérieusement, avant 20 ans c’est que des noms de merde dans ce genre) (« noces de crêpe » passe encore, c’est pas si mal, c’est bon les crêpes, mais « noces de cire », non mais fous-toi de ma gueule directement ça ira plus vite).

Bref, pour fêter nos noces de Froment avec toute la solennité que le nom requiert (pas), je suis allée au magasin d’alcool (car en Nouvelle-Zélande, y’a des magasins spéciaux qui vendent que de l’alcool, tu peux pas tout acheter au supermarché) et j’ai dégoté un pinot gris vendanges tardives d’Alsace, parce que hein, quand même, faut se faire plaisir de temps en temps, et c’est pas tous les jours qu’on fête ses noces de Froment.

(Laisse tomber, je m’y ferais jamais à ce nom.)

Et puis quand je suis rentrée à la maison, Flaxou est venu m’aider à décharger les courses, et il était tellement heureux d’avoir du vin d’Alsace qu’il est parti en courant vers la maison pour la déboucher, qu’il a glissé, et qu’il a explosé la bouteille juste sur le montant de la porte d’entrée.



Autant dire que, niveau mauvais présage, ça se posait quand même là.

Mais bon, je savais déjà que c’était un klutz le jour où je l’ai épousé, on a dit « pour le meilleur et pour le pire », et pour le moment c’est que ce que j’ai vu de pire, alors je pense qu’on est bons pour tenir au moins jusqu’aux noces de potasse (oui, ça existe).

- Ça se passe bien le jardinage, ma chérie ?
- Bof. Ça pousse trop lentement. Dans les jeux vidéo ça va tellement plus vite. Je sais pas pourquoi je me fais chier à essayer de faire pousser des trucs IRL pendant des semaines, sur Minecraft ça met genre dix minutes.
- La transformation est complète.
- Quoi ?
- T’es la femme parfaite.

(La définition d’une femme parfaite selon Flaxou, faut le savoir, c’est : quelqu’un avec des nichons, qui ne veut jamais sortir, qui veut que vivre dans le noir et jouer aux jeux vidéo en mangeant de la pizza, et qui fait tout ce qu’on lui demande.)

- Tu vas me chercher une bière ?
- Va la chercher toi-même, j’ai des dragons à chasser.
- … Bon, t’es PRESQUE la femme parfaite.

(Je pense que c’est les nichons qui me sauvent.)